Au cœur du sacré, le rhombe
Pour accéder au sens profond du rhombe, il nous faut passer par la pensée magique la plus ancienne. Il nous faut remonter au moins au paléolithique...
On pourrait aussi renverser l’ordre des termes : par le rhombe, accéder à la pensée magique de nos plus lointains ancêtres !
Et aussi par la religion.
La pensée magique
La formule qui la synthétise peut-être le mieux est celle-ci : « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ». C’est une formule de la « Table d’Emeraude », issue des enseignements ésotériques d’Hermès Trismégiste, le légendaire fondateur de l’alchimie.
Les principes qui semblent gouverner la pensée magique sont, en vrac, l’analogie, la symétrie, la correspondance, l’interdépendance, la réciprocité, la similitude, la spécularité, l’interactivité, l'interconnexion, l’interpénétration, la corrélation, la cohérence, l’indissolubilité, la complémentarité, l’unicité, la consubstantialité, la contiguïté, entre deux mondes réputés comme existant réellement l'un et l'autre : le visible et l’invisible.
La religion
On est bien d’accord, « religion » vient du latin « religare », qui signifie relier.
Mais, relier quoi à quoi, qui à qui ? Le visible à l’invisible ? Les membres du groupe social entre eux, pour éviter le chaos ?
En fait, il semble bien que la première proposition soit le mythe, alors que la seconde est le but effectif et vérifiable.
Le mythe est indispensable à la cohésion sociale, et il faut le réactiver par le rite.
Le rhombe est l’un des instruments les plus anciens et les plus universels de cette réactivation rituelle.
Le rhombe, origine du mot français
« Rhombe » provient du grec ancien Ρόμβος (rhombos), du verbe Ρέμβω (rhémbô).
Vous allez dire qu’on est bien avancé avec ça !
Eh bien si, on est bien avancé, et même très bien, car le verbe « rhémbô » signifie tourner, errer ça et là.
« Rhombos » est un mouvement circulaire, un tournoiement, une rotation, une action de brandir, de lancer.
C’est aussi tout objet de forme circulaire ou tournant, le rouet du magicien, et même... le pénis, avant d’être la forme géométrique du losange.
Tout est dit !
Donc, affirmer que le rhombe est ainsi nommé à cause de sa forme rhomboïdale est faux. C’est juste le contraire !
Nature et fonction « sacrées » du rhombe.
La forme du rhombe semble bien avoir atteint sa perfection au regard de son aérodynamisme, lié à la sonorité qui en est attendue, par exemple le meuglement de l’aurochs ou du taureau, en basses fréquences ou même en infrasons audibles seulement par les animaux, d'où l'effet de frayeur qu'ils produisent sur eux (20 / 70 Hz)., dès les âges les plus reculés.
Le rapport longueur/largeur semble se situer généralement autour de 4/1 à 7/1.
La question de la décoration a été longuement étudiée, surtout celle des « churingas », rhombes des peuples premiers d’Australie.
Il semble que cette décoration ne soit constituée ni d’une écriture ni d’idéogrammes en usage à l’époque et correspondant une la langue locale, mais de graphismes personnalisés, seulement connus par l’auteur propriétaire de l’objet, et par la divinité invoquée.
L’objet est tabou, c’est-à-dire qu’il est interdit aux personnes non initiées : femmes et enfants, et il reste caché à leur vue.
Le cœur du sujet est la mise en œuvre du rhombe au cours des cérémonies rituelles : c’est la symbiose produite entre l’objet (avec sa décoration, sa sonorité symboliques) et celui qui le manie, qui va en faire un objet « sacré », capable de faire entrer les participants en résonance ou en syntonie avec l’au-delà, donc qui va lui donner sa vie et son sens véritables.
La cérémonie est le plus souvent liée à des rites d’initiation qui font accéder les jeunes au statut d’adulte initié (restructuration individuelle après les troubles de l’adolescence) et qui, au passage, ressoudent la communauté autour du mythe (restructuration collective).
Ces cérémonies sont scandées par des phénomènes de transe auxquels divers éléments contribuent : le rhombe, le tambour, les plantes hallucinogènes, les chants, etc.
La sonorité du rhombe ressemble étrangement à la syllabe « OM » des Hindous, réputée imiter le « son de la Création ». C’est pourquoi elle est censée être la voix des ancêtres ou des dieux fondateurs.
En fait, comme aurait dit La Pallice, ce qui n’est pas naturel est « surnaturel » et, durant la transe, les participants entrent dans des états modifiés de la conscience qui, n’étant pas naturels eux non plus, sont considérés comme un voyage dans l’au-delà.
Les anciens Crétois pratiquaient des rites mystériques d’initiation, sous l’égide du dieu Mithra, au cours desquels ils sacrifiaient des taureaux, tandis que l’on on entendait le dieu mugir comme un taureau, depuis un lieu invisible, selon Eschyle. Qui ou quoi pouvait bien « mugir » ainsi, derrière le décor ?
Des études scientifiques (enregistrements très pointus) sont actuellement menées en Espagne, concernant les sonorités produites par les rhombes dans les grottes peintes de la préhistoire : les échos, les fréquences, les harmoniques varient d’un lieu à l’autre, mais surtout acquièrent de curieuses spécificités aux abords des parois peintes. A suivre !
La pensée magique est à l’œuvre : parler la langue du dieu, de l’ancêtre, du totem, aller les rencontrer dans l’au-delà, et les ramener au clan en leur faisant parler leur propre langue par le truchement du rhombe, voilà ce qui se joue.
Tout cela, pour dire à ceux qui prennent le rhombe pour un jouet ou pour un instrument de musique, ou pour un téléphone de brousse, sont un peu loin du compte !
Je ne veux pas terminer sans faire un peu d’humour : ce « mugissement » entendu dans le bruit du « bull roarer » ou du taureau de Mithra, c’est bien évidemment un produit de l’imagination, une métaphore.
Ce même bruit pourrait tout aussi bien aussi être entendu comme un vrombissement (essayez et écoutez avant de réagir !). Et un vrombissement de quoi ?, Parbleu, mais c’est bien sûr, de fusée!
De fusée extraterrestre ?
Au regard du contrat social, ou du consensus actuel qui veulent que les extraterrestres ça n’existe pas, cette hypothèse est clairement une grossière erreur, à moins que ce ne soit la preuve d’une pathologie avérée...
C’est bien à peu près cela que l’on disait à l’époque à Galilée, non ?
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