mercredi 31 décembre 2008

En Pays de Serres




Pas besoin d'aller bien loin pour trouver de la lumière!

samedi 27 décembre 2008

Le plongeur - Le petit bohomme en mousse


Une super marionnette qui parodie les plongeurs de haut vol.
Le guitariste fait le bruitage avec un "kazoo", qui n'est autre que la version nord-américaine de notre bon vieux MIRLITON.
Voyez la vidéo ICI.

El boj


Escarcha


Los primeros vientos fríos del invierno me devuelven a los caminos profundos de mi pueblo de Corréze, las “vías” como se les llamaba allí.
Claro está, son recuerdos de vacaciones o de días festivos en los que, con el sempiterno tirachinas en la mano y con los bolsillos llenos de guijarros hasta reventarlos, íbamos a disparar –en vano, desde luego– contra los mirlos y los gorriones en las ramas negras de los árboles, a veces erizadas de escarcha o encollaradas de armiño recién nevado.
Ni teníamos guantes ni nos molestábamos con abrigos o parcas como ahora se ven pero, uno o dos jerseys no siempre eran suficientes para cortar el viento, razón por la cual a veces buscábamos amparo en una concavidad del terraplén o en una mata de árboles.
Ahora bien, en invierno escasos son los árboles que conservan su follaje, siendo el boj uno de ellos, y los conocíamos todos.
Tengo todavía en los hombros y la espalda esa maravillosa impresión de alivio que de repente nos envolvía, resguardados del viento afilado y a veces de los copos, en el corazón de una mata de boj, embriagados por el perfume silvestre de sus innumerables y diminutas hojas densas.
El silencio del campo a veces entrecortado por algunos rústicos crujidos cincelados por el aire gélido alargaban a placer el tiempo de la “caza” y del juego.
El boj: ¡qué historia tan extraña la de su nombre y sobre todo la de su familia semántica!
La lengua española, a semejanza de sus hermanas latinas, incluyendo el inglés, han bebido en el latín buxus, el cual procedía del griego antiguo puxos : el boj. Hasta aquí, nada especial.
Pero la lengua inglesa nos reserva algunas sorpresas: si nombra “box” al árbol, también utiliza este término para designar una caja, e incluso el boxeo (el deporte). ¿Será que están locos esos ingleses? ¡En absoluto!
En efecto, ya en griego antiguo puxis designaba a la vez una caja de boj, madera preciosa, destinada a guardar joyas y una tablilla donde se escribían mensajes.
Pero, ¿qué se puede decir del “boxeo”? Volvamos al griego antiguo: pux, adverbio, significaba entonces “a puñetazos”. De ahí sacó el latín la raíz pug sobre la cual edificó pugnus, pugilatus, etc., términos que han dado en español “puño”, “pugilato”, etc. Y en inglés “to box”: boxear y “box”: el boxeo.
Nos queda la asociación del boj con el puño. ¿Será la dureza la que vincula los dos? En efecto, el boj es la madera más dura, después del ébano y, si los antiguos griegos no conocían el ébano, el boj era para ellos la madera más dura de la creación: era pues una referencia ideal para una metáfora de la dureza. Se puede notar que los masones siguen utilizando para sus ceremonias un mazo de boj como símbolo de firmeza y perseverancia: nada se pierde, en el fondo, en las tradiciones.
Pero, ¿qué diremos del hecho de que pux (pux/pugos) como sustantivo, se empleara a veces por pugé: “la nalga”, y que aquella raíz estuviera ya vinculada a los simpáticos pigmeos de la selva africana? ¿Juego de palabras, salacidad, humor griego? Uno se pierde en conjeturas...

Nosotros no sabíamos todo eso en el pueblo, ni tampoco éramos menos felices por ello; pero, ¿no es más divertido conocerlo?
Sólo conocíamos del boj su olor, sus aquenios con las cuales hacíamos “ollas” de cuatros patas, y sus ramos benditos que dejábamos a otros.
En cuanto a los hermosos trompos de boj, tan sólo habíamos oído hablar de ellos..., objetos de lujo que a veces veíamos en los catálogos. Los nuestros, se habían sacado de las hayas y de los robles de nuestros oquedales, y ¿no era mejor así? En efecto, ¿os habéis parado a pensar que, para tornear un trompo de boj de sólo cinco centímetros de diámetro, hay que sacrificar un árbol –a condición toda vez que sea bien redondo— que ha tardado más de cien años en crecer?
¿Será bueno quemar por los dos cabos la vela de la fiesta?

mardi 23 décembre 2008

Temps du jeu et jeux du temps.

Je surveille le compteur d’eBay. J’attends que s’affichent les 30 ou même 20 dernières secondes, à l’issue desquelles je vais lancer mon enchère, supérieure, bien sûr à celle qui s’affiche, dans la limite aussi de ce que j’entends donner pour l’objet, et terminée en « ,77 », histoire de troubler et surtout de doubler mon concurrent, pour le cas où il aurait inscrit un nombre entier : c’est une stratégie parmi d’autres !
Je surenchéris sur un vieux couteau, type Coursolle, que je restaurerai pour étoffer ma collection, puis que j’utiliserai effectivement pour fabriquer des jouets —j’en change, périodiquement, comme un autre change de cravate—, ou que je démonterai pour en récupérer des pièces.
Je suis d’ailleurs actuellement, et en parallèle, en train de fabriquer un prototype, avec un mécanisme auquel je réfléchis depuis longtemps, un système à échappement, que je pense avoir clairement imaginé, mais dont je ne suis pas encore sûr du tout qu’il marche…
J’alterne écran d’eBay et atelier: deux temps qui se télescopent !
J’ai laissé mon écran à plus de 30 minutes de la fin de l’enchère, et je suis revenu à mon atelier : il s’agissait de percer la double poulie que j’avais tournée ce matin dans une branche de noyer du jardin. Opération délicate, car il faut percer un trou bien au centre, et parfaitement perpendiculaire au plan de la poulie. Il convient aussi de faire le trou d’un diamètre supérieur à l’axe
que je me suis choisi —un ancien tuteur de plante en pot, en bambou— et bien poli à l’intérieur pour que la poulie tourne bien. Or, le bois de ma branche n’est pas encore parfaitement sec ; il va falloir le chauffer pour le sécher un peu, et aléser patiemment afin de les ébarber, les fibres qui sont encore instables.
Voici un temps nouveau qui s’installe, celui qui sera nécessaire au bois pour perdre un peu d’humidité, avec la chaleur de la main et celle de la mèche que je ferai tourner juste comme il faut, en lui maintenant une légère pression latérale, sans pour autant qu’elle devienne mordante. J’entends son crissement ; voilà un très bon signe.
C’est un temps rempli d’émotions : le bois du noyer, en se réchauffant, libère une invisible vapeur chargée d’un parfum de sève, fenêtre de sensations ouverte sur une journée de taille de l’été, déjà enfuie dans le passé.
Bon, ça y est, à peu près, dirons-nous : le centrage n’est pas parfait, l’axe non plus, mais le polissage est bon, et ça tourne bien. Comme aurait dit mon maçon italien, « Celui qui aura perdu sa femme ne viendra pas la chercher ici » !
Retour à mon écran. Surprise ! Il ne reste plus que 3 minutes 35 secondes avant la fin ! J’ai failli rater le couteau ! Comment tout ce temps a-t-il pu passer si vite?
J’ai maintenant les yeux rivés sur le compteur qui égrène les secondes à rebours, inexorablement. Que c’est long, 3 minutes 35, seconde après seconde !
Et ce compteur me fait penser à celui de la vie qui compte inexorablement mon temps… à rebours lui aussi.
Combien de « temps » interagissent ?
La recherche des matériaux, c’est déjà une respiration ludique ; je la déroule pas à pas, de l’amoncellement des glanes de l’atelier jusqu’aux fagots et arbres du jardin. Je retrouve de vieux amis sur qui des yeux ne s’étaient pas posés depuis longtemps et qui espéraient une visite : tubes, gitolles, planchettes, modestes chutes et rebuts qui me font signe pour reprendre une vie. C’est un temps poétique, au sens grec de «  » —poieo— qui signifie ‘créer’,
’fabriquer’, car sa marche a un but : trouver le bois dont le diamètre, la longueur, la dureté, sont déjà définis par un nouveau projet de vie pour lui, par ce « dieu », en l’occurrence, qui n’est autre que moi. Mais, ne serait-ce pas plutôt pour offrir un véhicule terrestre à cette « vie » que j’ai créée —ou qui s’est créée— dans l’imaginaire de mon projet ?
J’ai raté mon enchère ! Au dernier moment, mon ordinateur a « ramé » ; la surenchère n’est pas passée ; ça s’est joué à deux secondes !
Irrémédiable verdict du temps, que toute une éternité d’efforts ne pourra plus jamais faire revenir en arrière.
J’ai raté aussi ma première ébauche, mais là c’est moi qui suis le maître des événements, et donc d’une certaine manière, du temps : je vais pouvoir rembobiner le film et repartir sur une autre piste, juste à l’endroit où je n’avais pas pris la bonne. Le Popol Vuh raconte que les dieux s’y étaient repris à quatre fois pour réussir à fabriquer un Homme —et vous croyez vraiment qu’ils y sont arrivés ?— … Alors !
Le temps de la création n’est ni linéaire ni assuré ; il est souvent celui du doute ; il évolue entre longues plages désertes, magiques emballements, tenailles de l’impatience, et débâcles du découragement.
Je suis donc revenu en arrière, jusqu’au système de fil qui devait s’enrouler sur la poulie et soulever un galet destiné à retomber sur un élément sonore, une fois arrivé à son apogée. Mais, las !, ma roue de la Fortune n’était pas aussi bien réglée que celle du Destin, car le fil de la poulie s’emmêlait parfois dans la courroie, et le galet ne retombait plus.
Temps mort !
J’ai finalement opté pour un autre système : un marteau activé par une roue à came. Sans le savoir, ou plutôt inconsciemment, car j’ai déjà un jouet qui fonctionne sur ce principe, je venais de réinventer l’eau tiède, et en l’espèce, le « martinet » !
J’ai donc découvert que le "martinet", curieusement un diminutif du mot « marteau », est en réalité un énorme engin utilisé en particulier par les taillandiers depuis le Moyen Age (XIIe Siècle).
En voici une illustration que j’ai préférée à d’autres, à cause de l’ambiance extraordinaire qui y règne ; tout y est « incorrect » —au sens où l’on dit « politiquement incorrect »— : l ’ergonomie, la sécurité, l’hygiène, la santé !
Je n’ignore pas les conditions de travail scandaleusement dramatiques de la « Révolution industrielle », et ce n’est pas du tout de cela que je veux parler ; que l’on ne s’y trompe pas !
Je vais seulement me centrer sur la pipe de cet ouvrier, et tant pis pour le « médicalement correct ». Je contextualiserai cette pipe dans la posture générale de l’homme : certes tassée et peut-être lasse, mais d’une certaine manière aussi, relaxée, ou si l’on veut, non stressée. Par exemple, on ne déduit pas de cette posture une cadence qui empêcherait de contrôler à la fois la barre de fer et la pipe.
Cette image me fait penser au forgeron de mon village, un artisan, libre par conséquent de son temps et de ses gestes. Dans mon enfance, j’ai beaucoup observé cet homme qui a été pour moi, symboliquement, une sorte de vieil oncle ou de grand-père ; je l’ai même souvent aidé à tirer sur le gros soufflet de sa forge.
Il n’était pas riche, loin de là sans doute, mais il possédait une sagesse que j’admire encore. J’entends en ce moment à la radio le débat sur le travail du dimanche et autres déréglementations. Lui, il ne connaissait pas les 35 heures, et pour cause ! Je ne sais plus s’il travaillait le dimanche, mais je pense qu’il ne se l’interdisait pas. Ce que je sais, c’est qu’il savait trouver du temps dans le temps. Et c’est cette attitude même qui m’interpelle, cette sagesse que l’on retrouve dans le proverbe espagnol : « Entre golpe y golpe, descansa el hacha », et que l’on pourrait aussi bien appliquer au martinet de l’image qu’à l’ouvrier qui le conduit.
A y bien réfléchir, je pense que le stress qui affecte et use tant de nos contemporains est dû à une sorte de surchauffe nerveuse permanente des organismes qui ne peuvent plus ou ne savent plus « prendre le temps » ou trouver du temps dans le temps.
Mon forgeron faisait des journées interminables, mais lorsque le vent ou la pluie ou le Soleil ou tout autre indice qu’il savait repérer, devenait propice, il laissait là sa forge et partait pêcher la truite ou faire son bois dans la forêt. Il ne prenait jamais de vacances, mais il maniait encore le marteau, toujours plus maître de son geste et de son temps, à quatre-vingts ans passés !
J’ai subitement entendu et retrouvé tout cela lorsque mon martinet s’est mis à tourner : j’ai eu l’impression qu’il me donne une grande leçon de sagesse, en transformant l’incessant stress du ventilateur en coups de marteau posément espacés par de grands moments de « repos » : lui, il sait trouver du temps dans le temps, et son propre rythme au gré du vent !
Trouver le temps juste dans le temps ectoplasmique de la retraite, aussi indéterminé dans ses rythmes que dans son devenir et dans son terme, mais qui, paradoxalement, encadre et détermine tous les autres : voilà bien le défi !

jeudi 18 décembre 2008

mercredi 17 décembre 2008


Le livre de la "Genèse" raconte que le petit-fils d’Abraham, Jacob eut un songe : "Voilà qu’une échelle était dressée sur la terre et que son sommet atteignait le ciel, et des anges de Dieu y montaient et descendaient. " Un OVNI ?
Voyez ICI.

mardi 16 décembre 2008

Toujours la même fascination!


Les stagiaires de PEIPIN (Alpes Maritimes) sont devenus des maîtres: en voici la preuve.

lundi 8 décembre 2008

LE NOYER

Le noyer
Je suis le majestueux noyer
de nos campagnes. Connaissez-vous
mon histoire? Mon nom vient de celui de mon
fruit, la noix, que les Romains nommaient "nux juglans"
la "noix de Jupiter". Mais ma plus belle histoire, ce
sont les anciens Grecs qui l'ont écrite, lorsqu'ils m'ont découvert
aux confins de la Perse et m'ont donné un nom à eux: « caryon
persicon ». Ils m'ont aussi nommé "caryon basilicon", du nom
du roi des Perses, Basileus. Et le mot "caryon" cache une bien
émouvante histoire, celle de la petite Carya, la plus jeune
des filles du roi de Dion, en Laconie. Un jour, Dionysos,
le dieu de la vigne et du vin, qui avait été invité par
le roi de Dion, tomba amoureux de la jeune Carya, mais
ses deux sœurs jalouses la dénoncèrent à son père. Alors,
le roi furieux changea les deux traîtresses en rochers. On dit
que Carya en mourut de peine et fut métamorphosée en noyer.
En souvenir de cette tragédie, Artémis, la déesse de la chasse,
demanda que l'on érige un temple
en l'honneur de Carya, qui fut nommée depuis Artémis Caryatis.
Et, le fin mot de l'histoire, c'est que les colonnes de ce temple
furent sculptées sous forme de statues de femmes, et en bois
de noyer: ce sont depuis les "cariatides". Voyez comment on
écrit l'Histoire: les
Grecs avaient conquis une partie
de la Perse, et ils voulaient y imposer leur religion.

Ont-ils pour cela pratiqué
un sacrifice humain
comme cela se faisait
encore? Ils ont en tout
cas créé un mythe et
m'ont donné un nom
qui n'est resté dans la
langue française que
sous forme savante:
‘cariatides’, et ‘cariotype’
qui est la représentation
graphique des chromosomes.
Les mauvaises langues
disent que mon ombre est
nocive, que je suis asocial et
qu'à mes pieds il ne pousse
rien parce que mes feuilles
dégagent de la juglone. Si je suis asocial c'est que j'aime
la lumière, et si je sécrète de la juglone, c'est pour chasser les
autres plantes et préserver mon territoire: vous n'en
faites pas autant vous autres les humains?. Mais ne vous
plaignez pas, car la juglone détruit votre mauvais cholestérol!

vendredi 5 décembre 2008

« Lo vironzeu de la mai Polo »



Je n’arrive pas à me revoir en train de jouer avec le « vironzeu de la mai Polo ». Je tente pourtant de ranimer l’enfant que me montrent de vieilles photos de moi, dans des lieux dont je me souviens bien, mais ça ne marche pas ! Incommensurable distance de l’oubli de ce qui est pourtant là, quelque part, engrammé, derrière une porte invisible que je ne saurais même pas ouvrir, si je la trouvais…
Je ne sais pas non plus qui m’avait fait mon premier vironzeu, ni quel âge j’avais exactement, mais cela ne pouvait être qu’un autre enfant, plus grand, ou peut-être mon père.
Je sais seulement que, tout comme Obélix l’avait fait pour la potion magique, je suis tombé dedans dès ma plus tendre enfance.
Je sais aussi que ce jouet m’a toujours accompagné, au fond de quelque poche, à l’école, à la maison ou en vadrouille par les chemins et par les bois.J’ai dû en avoir des dizaines qui se sont succédés, au fur et à mesure que j’en perdais ou que j’en cassais un.
Je ne sais pas non plus à partir de quel moment je me suis mis à les fabriquer moi-même ; je suppose que cela a dû être très tôt car, au village, les enfants étaient bricoleurs et habitués à se débrouiller par eux-mêmes. Et personne n’y avait peur des couteaux !
Quant au nom, dont je me souviens fort bien, qui avait pu le lui donner, et quand ? Il me semble me souvenir que c’étaient les adultes qui le nommaient ainsi, avec une pointe de mépris pour leurs propres traditions: déjà !
Ce nom, en patois local, la langue de tous mes voisins, que je comprenais fort bien, me parlait clairement : « virar » signifie ‘tourner’, et ce substantif dérivé, « vironzeu », avait une allure et des sonorités à la fois familières et modestes, un peu lourdaudes, étranges et festives. Pour compléter cela, il était associé à « la mai Polo », que je m’imaginais sous les traits d’une de ces vieilles paysannes, fripées et noiraudes, avec leurs grandes mains rouges cuites dans les « pairols » pleins de « bacade » pour les cochons ou dans les interminables « bujades », comme il en venait quelquefois ‘au bourg’.
Le modèle, je m’en souviens très bien, car j’ai toujours construit le même, et le conserve encore aujourd’hui : la noix, bien sûr, l’axe et le fil en cordelière, et une seule ailette, courte et massive pour obtenir une bonne inertie, et pour que cela tienne dans la poche.
Ce qui a changé, c’est la technique de fabrication. A l’époque, on n’ouvrait pas la noix, non pas tellement que l’on n’eût pas de colle, mais parce qu’on avait toujours vu faire ainsi, et que l’on reproduisait à l’infini le geste, sans se poser d’autre question. Qui me demandait un jour pourquoi je peux affirmer que j’ai vécu mon enfance dans un temps circulaire ?
Je me pose une autre question : avec quoi pouvions-nous bien faire les trous dans la noix ? Ce sont mes mains qui me répondent, car le geste y est inscrit au plus profond : avec la pointe du couteau ! Une pointe bien aiguisée, mordante, en ne laissant dépasser de la lame tenue à pleine main, que le, ou les deux millimètres nécessaires.
Etant donnée la méthode de curetage, je suppose que les trous devaient être assez grands. En effet, il convenait d’évider la noix suffisamment pour que le fil, enroulé sur l’axe, ne se coince pas à l’intérieur.
Une fois les trous réalisés, il fallait partir à la recherche d’un bout de fil de fer. A la campagne, au moins à cette époque-là, un enfant n’avait aucun problème pour s’en procurer : de chaque haie, chaque barrière ou palissade, il en dépassait partout des bouts de toutes tailles, tous rouillés à des degrés divers. Il n’y avait plus qu’à en couper un tronçon. La méthode est simple, et il m’arrive encore de l’employer : on forme, avec le bout qui dépasse, une espèce de manivelle que l’on tourne, en maintenant fermement l’autre partie, jusqu’à la rupture.
Il n’y avait plus qu’à façonner un crochet et, patiemment, vider la noix par les trois trous. Question de patience et de temps ; mais il me semble que les minutes passées à cette opération étaient déjà de vrais instants de jeu.
Pourquoi le temps va-t-il si vite aujourd’hui ? Il me semble aussi que la longueur du temps vécu est inversement proportionnelle à celle du renouvellement de nos cellules…
Le nettoyage n’était jamais parfait, et j’ai encore sur les doigts cette impression de gras qu’y laissait l’huile de la noix mais, inversement, la lubrification du moulin était bien assurée !
Pour le fil, soyons franc, il fallait un peu le voler, car un simple bout de fil ne se gaspillait pas, surtout qu’il en fallait plusieurs longueurs pour faire la cordelière…
Restait à faire le montage. A ce propos, je n’ai aucun souvenir de la manière dont nous percions l’ailette : sans doute avec le poinçon du couteau, ou avec un fil de fer.
Ces précisions ont peut-être l’air de détails insignifiants. Que le lecteur se détrompe : pour l’enfant d’alors, qui était démuni sur le plan de l’outillage, c’était très important ; quant à l’enfant d’aujourd’hui, si bien outillé, mais si lamentablement maladroit, il est en situation encore plus difficile.
Et que dire du nœud coulant ? C’est bien simple : aucun enfant actuel n’en a la moindre idée, et bien peu de jeunes adultes sont capables de s’en dépatouiller ! Plus difficile encore : il fallait faire le nœud coulant à l’intérieur la noix, et sans pouvoir l’ouvrir. Le même problème se pose encore maintenant, lorsque le fil usé s’est rompu, ou lorsque la noix l’a avalé parce que l’on n’a pas mis de rondelle d’arrêt à l’extrémité de l’axe.
Une fois résolu le problème du nœud coulant, à l’aide d’un fil de fer recourbé, on fait entrer le fil par le trou qui lui est destiné, en utilisant la boucle du nœud pur le conduire, et on le fait ressortir par l’un des trous de l’axe. Ensuite, on passe l’axe dans la boucle et l’on fait entrer le tout dans le trou, en commençant par le nœud. Il n’y a plus qu’à resserrer en tirant sur le fil, tout en faisant tourner l’axe ; le jeu fera le reste.
Et voilà ; ça a duré ainsi environ 50 ans, jusqu’à ce que je me mette en campagne de collectage et que je découvre que d’autres avaient connu avant moi « lo vironzeu de la mai Polo », avec de nombreuses variantes, d’autres noms, dans d’autres situations !

Le premier que j’ai rencontré a été Pieter BRUEGEL (1525-1569), dit Brueghel l’ancien, grâce à son tableau « Jeux d'enfants », datée de 1560.
Avais-je vu, de loin, ce tableau auparavant ? Pour peu qu’on y réfléchisse, on est surpris de constater combien chacun regarde sans voir. Et c’est que la perception est un acte social : on ne voit rien sans projet.
Toujours est-il que, dès l’instant où j’ai eu ce projet de quête, je n’ai plus vu
que ça : « mon » vironzeu, là, à gauche, mais avec trois étages d’ailettes. Et je me suis empressé de le refaire à l’identique.
Et, quitte à y regarder de près, je me suis rendu compte que notre peintre devait fort bien connaître ce jouet, car il peint l’enfant avec le geste qui convient exactement, comme pour nous l’enseigner : une main tenant la noix et l’autre tirant sur la ficelle, alors que la plupart des gens saisissent spontanément l’axe du moulin! Un détail, cependant lui échappe, et c’est que les ailettes du bas devraient toucher la noix, car c’est sur elles que repose le poids de l’ensemble tournant, à moins qu’il n’ait voulu montrer le jouet en mouvement. En effet, sous l’effet de la vitesse de rotation et de l’aérodynamique, si les ailettes sont un peu incurvées, il arrive qu’elles se soulèvent.

Sur ma lancée, je me suis souvenu que François Rabelais (Chinon 1493/1494 – Paris 1553) écrit dans Pantagruel (1532), au Livre IV, chapitre LXIII :
« Carpalim, d’une coquille de noix grollière faisoyt ung beau, petit, joyeulx et harmonieux moulinet a aesles de quatre belles petites aisses d’ung traonchouer de vergne. »

Et du coup, mes recherches m’ont porté vers Jean Froissart, historien né vers 1337 et mort à Valenciennes vers 1404. Notre auteur visite Paris. Il entre par la Porte Saint Denis dont la décoration représentait le ciel étoilé, rempli d'anges chantant et, au milieu, la Vierge, tenant dans ses bras le petit Jésus jouant avec un petit moulin :
« Et, avec tout ce, il y avait une image de Nostre-Dame, qui tenait par figure un petit enfant, lequel enfant s'ébattait par soi à un moulinet fait d'une grosse noix. »

Les XIVe et XVe siècles semblent très riches de ces représentations ; il faut croire que ce jouet y était à la mode, ou bien qu’il y était considéré comme le ‘top’. C’est ainsi que l’on peut voir, au musée de Tessé, du Mans (Loire), sur un triptyque qui provient du prieuré Saint-Hippolyte de Vivoin, « La Vierge à l’Enfant, avec Saint Benoît ».
La peinture date de 1460.
Cette photo du triptyque a été pour moi une trouvaille extraordinaire, car elle repoussait de 100 ans la preuve de l’existence de mon vironzeu, par rapport à Bruegel.
Quant au site où je l’ai récupérée, je vous le donne en mille : un site italien sur les OVNIs représentés sur des tableaux religieux ! Les auteurs y soutenaient qu’il s’agissait rien moins que d’un… objet extraterrestre ! La « thèse » n’a par tardé à être ridiculisée, bien sûr .
Mais ce jouet n’ a pas cessé pour autant de susciter interrogations et interprétations . Gabriel Racle, chercheur canadien touche-à-tout, écrit dans l’Express du 6 au 12 novembre 2007 :
« On sait que ce jouet est arrivé jusqu’en Europe, sans doute lors d’échanges commerciaux. On voit ce qui semble en être une représentation dans une peinture d’un volet d’un triptyque des environs de 1460, conservé au musée de Tessé de la ville du Mans, en France: La Vierge à l’enfant avec Saint Benoît.
En tirant la corde, le petit rotor s’élève peut-être vers le haut à la manière d’un «hélicoptère». On trouve d’autres exemples de ce jouet dans un vitrail d’une église anglaise, sur une peinture de Jérôme Bosch exécutée à Vienne vers 1485 et sur un vitrail d’une église de Normandie, vers 1525. Toutes ces illustrations semblent prouver que le jouet chinois a fait du chemin et s’est amélioré en exportant le principe de l’hélicoptère.
»
Cela me semble plus sensé que l’OVNI ; en effet, je crois fermement que certains jouets, créations populaires naïves ou non, ont pu fournir des idées aux inventeurs. On voit cependant que l’auteur n’a jamais tenu l’objet dans ses mains, lorsqu’il dit : « le petit rotor s’élève peut-être vers le haut »…

En poursuivant ma pérégrination sur Internet, je suis tombé sur une petite merveille : il s’agit d’un « arbre de consanguinité », extrait d'un manuel juridique du XVe siècle, conservé à la Bibliothèque nationale de France . Le commentateur écrit ceci :
« De même, l’attitude des filles et des garçons diffère : les filles se tiennent assises sagement, lorsque les gamins jouent. L’un d’eux, en robe verte, couleur de la jeunesse, qui est assis à califourchon de la branche médiane, s’amuse avec un moulinet. Ce petit jouet, qu’on voit souvent aux mains de l’Enfant Jésus, est fait d’une noix creusée pour y placer un axe au sommet duquel est fichée une paire d’ailes de moulin miniatures ; une ficelle enroulée autour de l’axe et qu’on tire fait tourner les ailettes. Ce jouet dérive directement de la technique du moulin à vent ; la capacité technique est clairement placée du côté masculin - de même que la puissance financière : dans le couple originel, seul l’homme arbore une bourse à la ceinture - il dispose non seulement de la fortune de sa famille, mais aussi de la dot de sa femme. »

Je me permettrai, à propos du texte, de me demander si vraiment « Ce jouet dérive directement de la technique du moulin à vent », comme l’affirme l’auteur. En effet, les ailes du moulin à vent et celles du moulinet diffèrent nettement : les premières ont leur plan incliné à plus ou moins 30/45 degrés, alors que celles du moulinet sont clairement à plat, comme on le voit sur les deux représentations d’époque. Le principe n’en est pas la force du vent mais l’inertie, comme le yo-yo.
Cette magnifique miniature nous plonge oniriquement dans le lointain imaginaire médiéval : scènes, formes, couleurs, symboles. Et l’auteur ne pouvait pas savoir que cinq ou six siècles plus tard, un ancien enfant de la campagne y pourrait retrouver la simple poésie de ses premiers jouets.
Cependant, notre enlumineur n’avait dû observer le moulinet que de loin, car ni la position des mains telle qu’il les peint, ni la place de la ficelle, ne permettent de le faire fonctionner !

A propos du vironzeu, la référence à un « hélicoptère » me semble être inscrite au plus profond de l’imaginaire enfantin d’aujourd’hui. En effet, il n’est pas un jeune actuel qui ne le nomme ainsi.

Pour moi qui, enfant, n’avais pas encore vu ces engins volants, cela ne fonctionnait pas ainsi, et ça en dit long sur la façon que nous avons de ‘voir’ –et de nommer- le réel, alors que ça a l’air si simple et si évident : quand je vois, comment je vois ? Et à travers quels filtres culturels ou autres ? Quant les enfants modernes voient un hélicoptère, moi je voyais ‘la mai Polo’ …
Un jour que j’étais avec mes petits-neveux qui voyaient eux aussi un hélicoptère, « naturellement », —et nous avons vu que ce qui paraît naturel ne l’est en fait pas tant que ça!—je me suis mis à l’ouvrage avec eux, et nous avons fait vraiment un hélicoptère. Et voilà comment est né le dernier avatar en date du vironzeu de la mai Polo !

Eh bien, ce n’est pas tout : une jeune dame de ma famille, qui est responsable du personnel dans son Entreprise, me fait le plaisir de s’intéresser aux jouets rustiques et en collectionne quelques uns. C’est ainsi qu’elle possède trois ou quatre vironzeux, de formes et de tailles différentes, et en a un sur son bureau, au travail. Elle m’a dit un jour : « Votre moulinet est magique : quand les personnes entrent dans mon bureau, elle le voient et elles me demandent ce que c’est ; je le leur montre et je leur explique. Elles le prennent en mains et le font tourner et alors, vous ne le croirez pas, ça les aide à parler de leurs problèmes ! C’est une véritable aide à la communication !»


Un bien modeste jouet le vironzeu ?
C’est à vous de le dire.
Pour moi, c’est le symbole de toute mon enfance et, avec Pablo Neruda, je vous dirai : « Chez moi, j’ai rassemblé des jouets, petits et grands, sans lesquels je ne pourrais pas vivre. L’enfant qui ne joue pas n’est pas un enfant, mais l’homme qui ne joue pas a perdu pour toujours l’enfant qui vivait en lui, et dont il aurait tellement besoin. »

mardi 2 décembre 2008

Cet objet vous fait penser à quelque chose?


Gagné! C'est un WHIMMY DIDDLE, que l'on nomme aussi GEE HAW ou HOOEY STICK . regardez plutôt ici, sur YOUTUBE

lundi 1 décembre 2008

dimanche 23 novembre 2008

Citations à méditer

Chez moi, j’ai rassemblé des jouets, petits et grands, sans lesquels je ne pourrais pas vivre. L’enfant qui ne joue pas n’est pas un enfant, mais l’homme qui ne joue pas a perdu pour toujours l’enfant qui vivait en lui, et dont il aurait bien besoin. - Pablo Neruda.

La maturité de l’homme, c’est d’avoir retrouvé le sérieux avec lequel il jouait quand il était enfant. - Friedrich. Nietzsche.

Chaque enfant qui vient au monde nous dit: Dieu attend encore quelque chose de l’Homme. - Rabindranath Tagore.

Eduquez les enfants et il ne sera pas nécessaire de punir les hommes. - Pythagore.

dimanche 9 novembre 2008

UNE JOURNEE D'ANIMATION

Une journée d’animation parmi tant d’autres.

Pour voir d'autres photos, allez sur : http://picasaweb.google.com/daniel.descomps/JOUETRUSTIQUE?authkey=k4gxPNe7nNM#

Comme au printemps, toujours, renaissent les fleurs aussi belles, à chaque sortie jouets renaît l’aube du monde: je vais rencontrer des regards éblouis, petits et grands —il n’y a pas d’âge pour être jeune—, entendre des éclats de voix qui s’émerveillent et partager la joie des cœurs.
Peu importe qu’il fasse chaud, qu’il fasse froid ; le soleil sera dans leurs yeux. Et comme toujours, le petit miracle se reproduira.
Le rendez-vous a été pris, parfois longtemps à l’avance, parfois un peu au dernier moment, et les conditions ont été fixées : apporter ces joies qui font un pied de nez à la marchandisation de l’Homme et de la Nature.
Les jouets sont là, enfermés dans des poches de supermarché, disposés dans des bacs en plastique, un peu froissés quelquefois, et dans l’état où ils sont restés depuis le dernier remballage, toujours un peu précipité, de la dernière journée d’animation… surtout si c’est moi qui l’ai fait. Quelques-uns, qui avaient été mis " à l’infirmerie " ont été réparés ; d’autres, plus abîmés, trop fragiles ou un peu délaissés, ne feront pas demain le voyage.
Il faut quelquefois partir tôt le matin, aussi la plupart du temps, le chargement dans la voiture se fait-il la veille. Ah ! ne rien oublier, ni les outils, ni les petits matériaux : noix, cannes de Provence, boîtes de camembert, chambre à air, colle, et une infinité de chutes de bois, de ficelle ou de fil de fer, cupules, galles du chêne, qui passent l’année à somnoler au fond du bac et dont un jour on tirera ce petit objet inattendu qui fera le bonheur d’un enfant.
Parfois avant le petit jour, enveloppé dans la froidure de l’hiver, parfois à l’aube claire de l’été, respirant les dernières bribes de fraîcheur avant la canicule, mon compère Michel, qui est toujours à l’heure, m’attend au seuil de sa maison. Et nous voilà partis.
La carte, les itinéraires, les kilomètres, et enfin le lieu de destination : petit village, bourgade ou ville que l’on va découvrir au hasard de l’inspiration, en s’égarant dans les rues pour visiter un peu —je ne le fais pas toujours exprès—sous prétexte de chercher la salle ou la place qui nous accueillera.
Et puis voici la rencontre avec les organisateurs —parfois des retrouvailles, des amitiés nées d’une année précédente— ; tout est ici possible, mais c’est toujours déjà la fête qui commence : les jouets sont attendus : les anciens qui ont été aimés et les nouveaux qui vont faire des conquêtes.
L’installation, ah !, l’installation, toujours improvisée, inattendue ! Ici ce sera une ancienne étable au sous-sol d’une grange où pendent, du plafond, des toiles d’araignées séculaires d’où, tout à l’heure, tombera une dense pluie de poussière équivoque dont il faudra se protéger avec des parapluies de fortune. Là ce sera une somptueuse salle médiévale en ogives de pierres taillées, décorée d’un goût sûr, sorte de réfectoire de moines ou de repaire de chevaliers. Plus loin, un alignement de tables sur des tréteaux bancals, à l’ombre le matin, en plein cagnard l’après-midi. Et encore ces tables basses d’école maternelle où il faudra raccourcir ses jambes ou se casser les reins pour être à la hauteur, et ces magnifiques étals, couverts de nappes de papier pastel, sous le ciel d’une bâche lumineuse, parmi les arbres d’un parc gazonné. Et, tout en haut d’une colline sacrée, cette petite église souterraine…
Dans un silence respectueux ou dans le vacarme de baffles grands comme des camions, dont le souffle renverse et dont le bruit annule toute communication ; mais il paraît que maintenant " ça le fait " !
Cela, c’est pour le lieu. Il faudra maintenant déballer, classer, disposer les jouets par thèmes : le vent, la noix, l’eau, les mécanismes roulants et les autres.
Bien sûr, j’ai toujours oublié la bonne ficelle ou les punaises pour installer les funambules —et Michel me le rappelle vertement, en dissimulant mal son inépuisable bonhomie—, ou alors il n’y a rien au mur pour les fixer. Mais là n’est pas le souci! Le problème c’est le succès immédiat, incontrôlable —d’ailleurs, pourquoi le contrôlerait-on, si on est précisément venus pour le créer— : les premiers jouets n’ont pas été encore mis au jour qu’une nuée de visiteurs les a déjà pris en mains : les organisateurs et leurs enfants, les autres exposants s’il y en a, les maîtres des écoles qui veulent voir avant les élèves, toucher, jouer, régresser. Même l’autorité de Michel se révèle impuissante…
Et c’est irrépressiblement parti : jusqu’au soir il n’y aura plus une seconde de répit.
D’un côté, l’exposition où Michel règne en maître, et de l’autre l’atelier où je règne aussi —un peu moins ?—. C’est que, dans ce duo de grands pères demi clowns, il y a deux chefs, sans que personne ne sache qui est le plus chef des deux. Mais non ! C’est une blague ! C’est un truc d’animation où les fausses querelles, les reproches simulés et les compliments réciproques —ceux-ci parfois mérités— entretiennent la bonne humeur.
L’expo et un atelier .
On ne saurait présenter une animation ludique en " tirant la gueule " ! Mais, par bonheur, point n’est besoin de se forcer : les jouets, ces petites merveilles qui ont traversé les siècles et parfois les millénaires en se chargeant à chaque génération, d’un peu plus de magie, n’ont aucune peine à réaliser pour nous l’essentiel. Il n’y a qu’à les écouter et les suivre ; se laisser porter par eux.
Si l’atmosphère globale est toujours sensiblement la même, si les visages et les sourires s’épanouissent toujours aussi largement, les innombrables anecdotes inépuisablement diffèrent.
C’est le petit grand père un peu penché, un peu bancal, à l’expression figée, que ses enfants ont sans doute sorti pour un moment de la maison de retraite où, petit à petit, il s’éteint, le guidant par la main.
Péniblement il s’approche ; le regard reste vague et les mots d’encouragement de sa famille restent inopérants.
Je connais ce profil de visiteur, comme beaucoup d’autres d’ailleurs : tout comme avec les très petits enfants, les mots ne servent ici à rien.
C’est la saison de la folle avoine, et j’en ai préparé un fagot. Devant lui, sans un mot, je coupe un morceau de paille et je le fends —geste unique où l’erreur n’est pas permise—, et je le lui mets dans la bouche, bien profond :
—Soufflez !
Il n’a plus guère de souffle, le grand père, et ça ne marche pas.
—Plus fort !
Il semble que, du fond de sa mémoire d’antan, ressurgisse un souvenir, un souvenir gestuel. Il souffle plus fort, et, soudain, ça couine ! Et il recommence !
Le regard s’éclaire, les muscles du visage reprennent un peu de vie ; on sent presque une larme dans les yeux, et la bouche dit " Merci ! ".
Merci à qui ? C’est moi qui dois le dire, le merci ; merci à ce jouet qui m’a permis, aujourd’hui, de ne pas m’être levé pour rien, car grâce à lui j’ai pu éclairer un moment l’hiver de ce vieil homme. Et cet hiver, que je souhaite pour moi encore un peu lointain, j’en vois et j’en mesure pleinement la froidure…
C’est aussi cette petite mamie, bien mise —trop bien mise ?— dont le port noble et résigné trahit sans doute une grande solitude, et qui passe un peu loin, n’osant pas s’approcher.
Elle, il faut aller la conquérir, sortir du cadre de l’atelier, et, toujours sans l’obstacle des mots, lui présenter le " canta caramèl ".
—Moi, à mon âge ? Vous croyez ?
—Tenez ; soufflez !
Elle ose. Elle a encore de l’énergie. Et le bruit l’émerveille :
—Ah, ça, alors !
—Vous voyez qu’il n’y a pas d’âge pour être jeune —je n’ose pas dire " pour être belle "— ?
Combien de temps cela fait-il qu’elle n’avait reçu d’un étranger une aussi modeste expression de simple tendresse humaine ?
Ses traits se libèrent, et son sourire est beau.
Froidure et misère de la vieillesse emmitouflée de dignité, quel désert affectif entoure, isole au loin, ce cœur qui pourrait encore aimer ?
Elle est repartie, sans plus rien dire. Mais l’étoile filante d’un instant de bonheur aura, pour elle aussi, illuminé un peu son long parcours de solitude.
Encore une journée qui n’aura pas été perdue !
Pendant ce temps là, les plus jeunes, déjà équipés de mirlitons, de " buses " et ce " canta caramèl ", s’égayent dans la fête, emplissant l’atmosphère de leurs chants, de leurs cris, de leurs rires.
Mais le centre de l’attraction magique, c’est Michel —il aurait fait un bon sorcier !— qui, ludion en mains, captive les foules agglutinées autour de lui.
Il y a ceux qui savent et ceux qui ne savent pas ; ceux qui trouvent et ceux qui ne trouvent pas la " ficelle ". Adultes et jeunes de tous les âges, hommes et femmes confondus.
Et il faut voir les visages des uns autant que ceux des autres, entendre les commentaires, les rires, les exclamations lorsque quelqu’un comprend, les reproches quand un petit malin explique trop tôt le truc !
Il faut dire que Michel ne fait rien pour aider ceux qui " sèchent " ; il m’appelle même parfois pour que j’apporte les ciseaux, " ceux qui coupent bien ", et que je sectionne la ficelle. Et bien entendu, cela ne fait qu’augmenter la perplexité des curieux.
L’exposition est immanquablement le coeur d’une ruche qui bourdonne en permanence.
Les questions fusent de toutes parts : sur les techniques, les matériaux, la provenance des jouets, leur histoire et leur authenticité, les outils, sans compter les demandes de ceux qui voudraient en acheter —mais il n’y a rien à vendre !—, et Michel qui les connaît tous très bien ne manque pas de répondre complaisamment. Et s’il lui vient parfois un doute, je l’entends dire au visiteur :
—Allez voir le monsieur avec la barbe, là ; c’est lui qui les fabrique, et il vous l’expliquera.
Et puis, il y a la " grenouille ". Ah ! La " grenouille " !
C’est le monde du merveilleux à l’état pur.
Et vous, qui savez lire ces lignes, vous l’entendrez peut-être, mais vous ne pourrez plus jamais la voir…
La grenouille, elle a toujours un peu soif, ça n’aime pas la sécheresse les grenouilles ; aussi faut-il souvent lui donner à boire. Elle a donc un verre d’eau après d’elle et, chaque fois qu’un enfant approche, on commence par tremper le bâton dans le verre, en expliquant bien qu’elle a soif, et que si elle ne boit pas, elle ne pourra pas chanter. C’est qu’il convient de mettre en place le sortilège !
Vous n’y croyez pas, vous ? Cela ne m’étonne pas, et c’est malheureusement normal. Passés les deux ou trois ans d’âge, on a perdu la faculté d’apercevoir la grenouille, sauf Michel et moi qui avons encore conservé ce don.
Arrive le grand moment pour les magnifiques photos : il convient que le photographe se place derrière l’animateur, face à l’enfant qui regarde. Il doit y avoir, dans les albums de famille, des dizaines ou des centaines de ces instantanés uniques où l’on saisit, grandeur nature, le merveilleux tout vif, dans les grands yeux des petits.
—Tu es prêt ? Alors, écoute : la grenouille va chanter.
On fait tourner le bâton mouillé, entaillé d’une encoche circulaire, autour du fil guipé bien tendu, et la grenouille chante ! (Pour les grands, disons que le ripage du fil guipé —autrefois on employait du crin de cheval enduit de paraffine— sur le bois du bâton produit une vibration transmise à la membrane de plastique épais et amplifiée par la caisse qui peut être un tronçon de gros bambou ou une boîte fabriquée avec des planches de cagettes de fruits. Mais ça, c’est l’arrière cuisine, c’est la face cachée du sortilège.)
L’enfant est entré pleinement dans le jeu ; il en oublie le flash et le public qui s’extasie, qui s’attendrit, qui n’en perd pas une miette.
—Alors, elle y est, là, la grenouille ? Regarde bien !
Les bustes se penchent en contorsions, les têtes se redressent à l’envers, et les regards tentent de sonder le fond de la boîte, par-dessous.
—Oui, elle y est !
—Non…, je ne la vois pas… —se lamente un autre.
—Eh bien, mets la main ; essaye de l’attraper, tu verras bien si elle y est.
Va-t-il (elle) oser ? Ne serait-ce pas un peu risqué ? Certains s’ aventurent, d’autres pas.
Alain le philosophe, pédagogue serein et avisé, écrivait qu’il fallait surprendre l’enfant par des tours de magie, lui faire vivre pleinement cet instant d’exception, puis, tout doucement pour ne pas rompre brutalement le sortilège, l’amener à réfléchir. Et il avait raison, car le but n’est pas de tromper l’enfant.
Nous avons choisi pour cela de dire :
—Tu crois que papa (ou maman) saurait la faire chanter, la grenouille ?
Perplexité, crainte de la mise en échec du parent aimé et admiré, parfois ils hésitent : regard inquiet vers papa ou maman, et aussi vers l’animateur. Faut-il avoir confiance ? Mais l’invitation, toujours très ludique, accueillante et jouant sur la curiosité, réussit immanquablement à emporter l’adhésion.
Et maman ou papa s’y prêtent de tout cœur, offrant leur tendre complicité, tellement bien que je me demande souvent s’ils ne l’ont pas vue, eux aussi, la grenouille, tant la contagion est forte du merveilleux où est plongé leur enfant.
Savons-nous apprécier pleinement ces uniques instants, éphémères, beaux et fragiles comme papillon qui butine ?
Puis chacun construira sa réponse et partira avec son rêve…
La " grenouille ".
Au cours des animations, les compliments, parfois émouvants, toujours sincères feraient presque rougir si on les prenait pour soi. Peut-être sommes-nous un des maillons de la chaîne culturelle que nous tenons en mains ? Mais c’est au jouet lui-même, donc à ses créateurs et aux générations qui l’ont porté, que va toute cette reconnaissance !
Il serait difficile de rapporter les mots entendus : peut-être que le lecteur penserait qu’ils ont été " arrangés ". Par contre, il est facile de recopier quelques exemples de ceux qui ont été écrits sur le " Livre d’Or " de l’exposition de Pujols en 2004 :
Par des enfants (Orthographe respectée)
" C’est super impresionnant se que vous faite en si peut de temps. " Pierre.
" C’est trèst joli votr magasin, jaime bien vo chose sa alair trest dure a faire. " Lucie 7 an.
" Je trouve ça vraiement bien, je vois qu’avec un petit peu de bois on peut faire des choses extraordinaires, félicitations " Lena.
" C’était vraiment bien ! Je ne me doutais pas que quelque chose d’aussi simple puisse être aussi amusant ". Louis
Par des adultes
" Tout ce qui n’est pas donné est perdu, merci de nous transmettre vos connaissances. " Patricia.
" Des doigts de fée plus de l’intelligence, c’est beaucoup de bonheur pour les yeux et les cœurs des enfants et des adultes. Bon courage ! "
" Ce qui se passe ici est merveilleux. Des personnes avec un tel amour n’existent plus beaucoup. J’aimerais essayer de me fabriquer aussi de telles merveilles. " Joséphine.
" Garder une démarche et un esprit d’enfant, quoi de plus sain dans cette p… de vie qui nous entoure ! ! ! " Simon, Fanette, Jeanne, Didier.
Atelier à Pujols
On pourrait multiplier ces citations, au risque de lasser le lecteur. Ces quelques exemples suffisent, je crois, pour donner le ton.
Et, pour l’animateur qui est bien conscient de ne pas y être pour grand chose, c’est tout de même aussi de merveilleux instants de bonheur partagé.
Voici maintenant que se présente une presque " jeune fille " —13/14 ans—.
—Vous savez, j’ai acheté votre livre et j’ai fabriqué un jouet.
—Ah, bon ! Lequel ?
—La Colombe d’Archytas.
Je suis toujours étonné par les choix, surtout les premiers, que font les débutants. Ce ne sont, bien sûr, jamais les mêmes, et ce sont souvent des modèles difficiles. Cela confirme bien au moins deux choses : que le choix fonctionne au " coup de cœur ", et qu’un accompagnement est nécessaire.
—Et alors ?
—Alors, j’ai un souci parce que la ficelle sort de la poulie, et ça ne marche pas… Mais, si vous voulez, j’habite pas loin et je peux vous l’apporter.
—D’accord ; avec plaisir.
Et voici que la petite revient avec son jouet. Autre surprise, qui n’en est plus d’ailleurs, tant la chose est fréquente : la touche personnelle apportée à la réalisation. J’ai, pour ma part, réalisé le jouet dans de petites dimensions —à peine 20 cm de long pour l’ensemble—, et dans du bois fin et assez léger. Le sien mesure bien 60 cm, et le bois principal est une véritable branche, coupée sur un arbre sec, légèrement tordu, qui a été fendu et percé d’énormes trous, et la poulie est faite d’un disque d’aggloméré d’au moins 20 cm de diamètre. L’ensemble est à l’avenant.
—C’est toi qui l’a fabriqué ?
—Oui, toute seule !
—Eh bien, chapeau pour les petites mains ! Voyons un peu.
L’ensemble est tellement lourd qu’il n’y a aucun problème pour obtenir la force nécessaire au battement des ailes ; il n’y a même pas besoin de contre poids.
—Je vois : tout est prêt pour que cela fonctionne ; le seul problème, c’est que ta poulie n’est pas bien fixée à son axe. Donc, lorsque tu suspends le jouet, le poids te la met en travers et, naturellement, la corde saute ! Attends, on va arranger ça.
Ouf, je n’avais pas oublié ce jour-là le tube de colle à bois. Notre jeune réalisatrice a tout de suite compris, et nous avons collé la roue.
Le plus long, c’était d’attendre que ça sèche, et la journée était terminée. Elle est repartie ainsi. Mais, si quelque problème subsiste, de cette jeune tête où tout est maintenant bien clair, je ne doute pas que surgira la solution.
Le cœur a ses raisons…
" Ici, il n’y a rien à vendre ! " Combien de fois par jour sommes-nous amenés à redire cette phrase qui déçoit tant de monde ?
Mais, existe-t-il règle sans exception ?
La dame a vu, touché, essayé tous les jouets de l’exposition. Elle tourne, s’éloigne et revient, puis s’enhardit et s’approche, tenant en mains la " Ronde aux sept nains ".
—C’est combien celui-ci ? L’accent est anglais, la courtoisie impeccable, et quelque chose dans la voix et dans les yeux révèle un intérêt étrange.
—Ici, il n’y a rien à vendre, Madame.
—Ah ! Mais, vous ne pourriez pas me faire cette faveur ?
—Non, vous savez, ici nous voulons donner envie de faire les jouets soi-même. Notre but est éducatif, pas commercial.
—S’il vous plaît, pouvez-vous venir et m’écouter ?
Et la dame m’entraîne un peu à l’écart de la foule des visiteurs.
—Je vais vous expliquer : c’est pour un cadeau bien particulier.
—Je comprends, mais…
—Non, vous ne comprenez pas ! C’est pour mon mari, pour son anniversaire.
—Ah !
—Mon mari, il est là-bas, dans la voiture. Il est très malade, et il n’a pas pu venir jusqu’ici. Mon mari a travaillé le bois toute sa vie, et il adore ce style de jouets. Vous voyez, il fête bientôt son anniversaire, et il m’a dit : " Tu sais, ce sera le dernier… ".
—…
—Nous serons sept à son anniversaire, les plus intimes de la famille, et sur ce jouet il y a sept personnages. Vous ne croyez pas que c’est un signe ? Ce serait pour lui une si belle surprise !
—…
—Je vous en supplie, faites une exception Ce n’est pas le prix qui compte, vous me comprenez bien ; dites-moi combien…
—Je ne sais vraiment pas quoi vous dire.
—Ne me dites rien ; tenez, personne ne nous aura vus.
Et la dame m’a glissé quelque chose dans la main. Je n’ai même pas regardé. J’ai seulement vu les larmes dans ses yeux, mélange émouvant de joie et de tristesse.
Pourquoi dire ou questionner plus ?
La dame est repartie dans l’anonymat de la foule, vers son amour et vers l’angoisse de son deuil à venir.
Les " Sept nains " ont dû ajouter leur modeste présence à une intense fête d’ombre et de lumière.
Sont-ils, aujourd’hui, orphelins ?
Tout cela pourra surprendre le lecteur, lui laisser croire qu’il s’agit là de rares exceptions ou que ce sont les seuls événements qui ont marqué des années de pratique.
Eh bien, il n’en est rien ! Ce ne sont en effet que des exemples, parmi les plus récents, et vieux d’à peine quelques mois, à l’heure où je les relate.
D’autres, innombrables, se sont un peu brouillés dans ma mémoire : j’ai seulement le souvenir qu’il y eut de gais, d’hilarants, de pittoresques, d’incongrus, ou de plus émouvants encore.
Au rythme, et à l’intensité des instants, la journée file en comète.
La fatigue s’installe : par les journées de grand froid, les os ont gelé malgré les petits ou les grands " remontants ". Les soirs de canicule, on est un peu " dans le rouge " comme on dit " sur le Tour de France ".
Il va falloir ranger : les deux compères se donnent le signal mutuel.
Et…, c’est maintenant qu’ils arrivent ! Les visiteurs de la vingt-cinquième heur, plus impatients, plus passionnés s’il est possible, que les autres.
Combien de fois a-t-il fallu ressortir tel ou tel jouet, pour une photo, pour une explication ? Car le bouche-à-oreille a bien fonctionné. Reprendre le couteau pour confectionner un dernier mirliton —un avant-dernier ?—, une dernière " buse " pour la petite sœur, pour réparer un irréparable " canta caramèl ".
Et il faudra laisser cruellement sur place la cohorte des déçus du jour, bien trop tardivement arrivés, à moins que la séance ne se poursuive… dans la rue, après que le concierge de la salle, qui respecte les horaires de travail, nous ait fermé la porte à regret.
Michel a réussi à remballer impeccablement l’expo ; l’atelier, quant à lui, a été chargé un peu —ou beaucoup— dans le désordre. Les au revoir, à l’année prochaine, les embrassades parfois, et c’est parti.
Sur la route, on " décompresse ", on commente.
La charge de fatigue disparaît sous la dose d’adrénaline.
Ce soir, avec autant d’émotions, de souvenirs et… de crampes dans tous les muscles du squelette, il faudra encore longtemps pour s’endormir…
—Au fait, c’est où la prochaine sortie ?

Ludus carnavalis



Ludus carnavalis

C’est de voir mourir les uns après les autres tous les pèrenoëls auxquels, hier encore, nous croyions, eux qui avaient bercé ou structuré notre âme d’enfant et même d’adulte confiant, que me vient cette grande amertume.
On dit que l’étude des choses du sacré fait devenir anticlérical ou mystique : il me semble que je deviens les deux ! D’ailleurs, n’est-ce pas la même chose ? Voyez comment les mystiques —Ste Thérèse d’Avila, les Soufis, etc.— sont mal vus par leurs propres hiérarchies …
On ne se lasse jamais de déconstruire l’inextricable réseau sémantique qu’a patiemment et savamment tissé l’Eglise catholique —chapeau les artistes !— , pour coloniser et gouverner notre pensée. Et, à l’amertume de se sentir floué vient s’ajouter l’indignation !
Ainsi en est-il à propos du Carnaval.


Le Carnaval : ce que l’on observe.
Il n’est pas ici question de décrire par le menu tous les carnavals que chacun connaît bien. Je tenterai plutôt d’en extraire les points communs, d’en schématiser en quelque sorte la structure.
Commentons un peu ces aspects communs. Nous les reprendrons plus loin différemment.
*Les lieux : il semble aujourd’hui que le Carnaval se célèbre un peu dans tous les pays du Monde. C’est une indication trompeuse, sur laquelle il faudra revenir.
*Un aspect caractérise tout de suite le carnaval, c’est le moment où il se déroule : le cœur de l’hiver, et cela, quels que soient la latitude ou le continent. Voilà une caractéristique importante et qui sera très révélatrice.
*Les déguisements sont de tous les Carnavals, et les masques aussi, qui, beaucoup plus que l’anonymat symbolisent le chaos.
*Les bruits : surtout avec des instruments en bois, qui produisent des sons secs, réputés chasser les mauvais esprits, comme les crécelles.
*La levée des interdits et l’inversion des rôles sont bien entendu les points les plus polémiques. Une morale étriquée et myope n’y a vu que l’extériorité, alors que c’est l’un des fondements essentiels de la fête.
*Le feu, et la crémation du " Bonhomme Carnaval ". Tout a une fin, et celle-ci est chargée de symboles de purification.

Le rôle historique de l’Eglise catholique
Afin de bien contextualiser le rôle de l’Eglise catholique face au Carnaval, il convient de rappeler quelques faits historiques.
Au IVe siècle de notre ère, l’Empire Romain n’était plus ce qu’il avait été. Il lui fallait se ressaisir, en retissant les liens politiques et sociaux.
Parallèlement, ce qui n’était encore que la secte chrétienne, prenait de plus en plus d’importance dans l’Empire.
On sait qu’il n’est pas possible de gouverner les peuples par la raison, et l’empereur Constantin (274 – 337) le savait aussi. En bon stratège, il comprit que, plutôt que de combattre le christianisme —il faudrait dire : le ‘paulinisme’, car cette Eglise est plus celle de Saint Paul que celle de Jésus !—, il valait mieux le noyauter et le détourner à son profit. Il en fit donc une religion d’Etat, fondant ainsi un empire théocratique, ancêtre de l’Etat du Vatican, lui qui, rappelons-le, n’était pas chrétien et avait commis, sur au moins cinq des membres de sa plus proche famille, autant de crimes ou assassinats…

Le Christianisme étant devenu Religion d’Etat, les divers ecclésiastiques de l’Empire, bardés de certitudes et de pouvoirs, les " milites Christi " ou " miliciens du Christ ", allaient s’affronter, en Gaule, Hispanie, Germanie, aux religions locales des " pagani ", autrement dit des ‘ploucs’, qui deviendront ensuite des ‘païens ".
Ces religions locales étaient de style druidique ou chamanique. Le fait qu’elles s’adressent à d’autres dieux ne devait pas être l’obstacle principal pour l’Empereur qui adora toute sa vie Sol Invictus, fut aussi arien, et ne fut baptisé qu’à l’article de la mort !
Par contre, ces religions n’avaient pas de structure centralisée, chacune s’arrangeant à sa manière avec son druide ou son chaman, dans l’inextricable foule de leurs dieux, comme cela a été si bien caricaturé dans " Obélix ".
On comprendra vite que cette ‘anarchie’ devait nuire considérablement à l’unification de l’empire.
La méthode syncrétique du recouvrement d’une religion par une autre, telle que l’on peut encore la voir en action en Amérique Latine, s’imposa. Par exemple, c’est en 354 que le pape Libère fit naître officiellement Jésus le 25 décembre, jour de la naissance de Sol Invictus.
De la même manière, les temples ou les " nemetons ", dédiés à Bélénos, la principale divinité gauloise, ont été recouverts par l’archange Saint Michel qui possède à peu près les mêmes attributs que lui.
On pourrait multiplier les exemples à l’infini, car la méthode a été systématique.
Revenons au Carnaval.
Dans son zèle prosélytique, l’Eglise s’est ménagé de nombreux arrangements avec le Ciel, bien sûr, mais aussi avec l’étymologie.
Les dictionnaires actuels en portent encore la trace. C’est ainsi que la plupart d’entre eux donnent au mot " Carnaval " des définitions qui tournent autour de ceci :
1 . Période de réjouissances profanes qui va de l’Epiphanie au début du Carême.
2 . Divertissements publics (bals, défilés) du Carnaval.
3 . Période où l’ordre social, les hiérarchies sont symboliquement supprimés ou retournés.
Les plus savants donnent même l’étymologie : le mot serait issu du bas latin ou de l’italien " carne levare ". On aurait donc : " carne ", du latin " caro "/ "carnis ", qui signifie chair des animaux et des fruits, matière par opposition à esprit, et " levare " qui, par ‘haplologie’ —excusez du peu !—, aurait donné " carnevale ", et " carnaval.
Super ! Mais, quest-ce, diable, que l’haplologie ? C’est la suppression d’une syllabe qui se trouve, ou bien redoublée dans un mot, —comme " obamamania " qui devient " obamania "— ou bien trop ressemblante à une autre.
Mettons cela en application : " car-ne-le-va-re " ; quelles sont les syllabes identiques ou ressemblantes ? … Aucune. Ah !
Si " carne levare " est devenu " carnevale " > " carnaval, il y a eu une inversion entre deux syllabes, " le " et " va ", et il s’agit d’un métathèse.
Alors, pourquoi parler d’haplologie ? On croirait entendre les médecins de Molière…
Mais, admettons qu’il s’gisse bien de " carne levare ". Alors, ce verbe, " levare " ? Il provient de l’adjectif " levis " qui signifie léger, d’où son premier sens, soulever. Il signifie aussi alléger, soulager, et enfin ôter, enlever.
" Carne levare " signifierait donc soulever, ou alléger, ou même ôter la viande. Pour un mardi gras, ‘ça le fait pas’, comme on dit aujourd’hui.
Mais, bon, c’était le Moyen Age et, avec une bonne dose d’haplologie, ça pouvait passer. Le bon peuple devait admirer ce beau parler, et ça suffisait bien.
Mais il y a toujours quelques pisse-vinaigre, pervers empêcheurs de tourner en rond, qui se mêlent d’apprendre à lire et, pire encore, de réfléchir.
On est donc passé à autre chose, qui semble bien moderne encore aujourd’hui : " carnaval " viendrait de l’italien —ça marche aussi en espagnol— " carne vale " (en latin, " vale " veut dire ‘porte-toi bien’), où " vale " signifie à peu près ‘d’accord’.
Ouf ; on en avait encore pour quelque temps !
Mais, patatras ! Et si ce n’était pas ça ? Ah, ces fausses étymologies ‘vendues’ par l’Eglise au Moyen Age !
On est maintenant sur une autre piste. Plus sérieuse, peut-être : la racine indo-européenne " KRN ".
Pour retrouver les racines indo-européennes des mots, il suffit parfois d’enlever les voyelles ; on peut ici se livrer à l’opération inverse, et on trouvera, entre autres, " corne ", et les chercheurs ont tout de suite fait le rapprochement avec Cernunnos, le dieu celtique cornu —les cornes symbolisant ici la puissance—, nommé ainsi sur une inscription gallo-romaine du musée de Cluny.
On pourrait penser aussi au mot espagnol " cornudo ", qui signifie cocu. Nous y reviendrons.
Dans la langue celte, " kern " désigne le sommet de la tête et les bêtes à corne, comme le cerf.
Sans aller beaucoup plus loin, on trouvera encore la tribu gauloise des Carnutes, la trompette de ces mêmes Gaulois, le carnyx, et encore Carnac, cairn, et peut-être... couronne. Oh, scandale !
En s’inspirant des nombreuses recherches publiées ici ou là, on pourrait facilement faire étalage d’érudition, mais ce serait lâcher la proie pour l’ombre. Un peu comme si on s’attachait, s’agissant du mariage, à décrire en détails la forme des souliers, des plats de la cuisine ou des cordes des instruments de musique. On oublierait ainsi la signification essentielle et fondatrice de la cérémonie, qui est la protection de l’ordre social, par l’empêchement du vagabondage sexuel —source majeure de trouble—, et l’assurance de la bonne reproduction et de l’éducation de l’espèce.
Et puis que nous parlons de mariage, revenons à nos " cornudos ", et pensons aux représentations traditionnelles du Diable, sous les aspects d’un bouc doté d’une magnifique paire… de cornes !
Il ne faut pas oublier que le Diable, tel que nous le connaissons aujourd’hui, est une invention assez tardive de l’Eglise catholique, qui a fait d’une pierre deux coups : diaboliser les religions locales en donnant au Diable les aspects de leurs propres divinités ! Même chose pour les servantes de ces cultes, qui sont devenues des " sorcières ".
Et les cornes de l’infortuné mari ? Pas difficile ! En tant que fauteur de trouble —pour ne pas avoir ‘tenu’ sa femme suffisamment—, il était forcément diabolique. Car le Diable, c’est aussi le trouble : celui du Carnaval, car il est double.

Où est-ce que cela nous mène ? A considérer que le Carnaval est la survivance, plutôt mal tolérée, de religions préexistantes, diabolisées par l’Eglise catholique.
Je dis que ces religions antérieures étaient chamaniques et, en disant cela, je ne prends pas beaucoup de risques, car il est probable que toutes les religions ont cette origine. Mais il faudrait définir le mot qui est au centre de cette affirmation.
Le chamanisme, de manière schématique, est une pratique religieuse fondée sur un ou des états modifiés de la conscience, obtenus par des moyens divers : drogues (la ayahuasca, le peyote, le chanvre indien, l’opium, l’alcool de notre bon vieux Noé…), le jeûne, le tournoiement sur soi-même (les Soufis), etc. Une fois plongé dans cet état, le chaman croit être directement en contact avec l’au-delà, avec les dieux, et ses fidèles aussi. C’est une logique simple : ce qui n’est pas naturel est surnaturel.
Oui mais voilà : le chamanisme ne s’embarrasse pas de structures institutionnelles, et, de plus, il est pleinement en phase avec les cycles naturels de la nature et de l’Homme. Et ça, ce n’est pas bon pour les dictateurs, qu’il s’agisse des politiques ou des financiers !
Nous avons vu que le Carnaval est célébré un peu partout dans le monde. Je crois cependant qu’il ne peut être originaire, sous la forme que nous lui connaissons, que de l’Europe du Nord. En effet, et en raison même de ses composantes chamaniques intimement imbriquées dans les cycles des saisons, on ne voit pas vraiment le lien, par exemple au Brésil, sous les Tropiques, ou dans l’Hémisphère sud, avec l’inversion des saisons..
On me dira que le " Pourim " des Juifs est une sorte de Carnaval ; c’est vrai sur le fond, mais il se trouve que ses manifestations les plus " carnavalesques " (les déguisements, la beuverie) il les doit à ses influences européennes yiddish, et non à son passé biblique.
Tout cela plaide pour une recherche plus approfondie.

Le sacrifice fondateur.
Nous allons maintenant remonter beaucoup plus haut, et pour cela revenir à Cernunnos. Ce dieu, gaulois et celte, était identifié au cerf. Le cerf : en voilà un sacré animal ! Et aussi un animal sacré. Ambivalence du Sacré…
D’une manière quasi universelle, le cerf symbolise une foule de caractéristiques essentielles : la force vitale et la sexualité, le renouveau avec la chute et la repousse de ses bois, la terreur sacrée par l’outrance de son brame.
Et ce n’est pas tout : il passe pour être un grand connaisseur des herbes médicinales, et un amateur d’amanites tue-mouches, champignons… hallucinogènes.
Mieux encore, il passe pour un véritable initiateur en ces pratiques magiques.
Voilà pourquoi les chamans de Sibérie lui rendent un culte aussi diligent.
Ayant tout cela à l’esprit, c’est en réexaminant toutes les caractéristiques bien connues du Carnaval, que nous allons retrouver René Girard et le sacrifice fondateur du " bouc émissaire ". Tiens, le bouc, encore un animal cornu !



Les déguisements, avec les masques et les bruits d’instruments cacophoniques, l’inversion des rôles et la dissolution des interdits : ce premier ensemble caractérise très précisément le chaos, dans le " conflit des doubles ".
Les doubles jouent ici un grand rôle.
Si l’on observe un peu le champ sémantique des termes associés au Carnaval, on découvre facilement le concept de " double ". Par exemple, le " Diable " —" dia-bolos " de "dia" = " divisant complètement" et de "bolos" (b a l l w) = "jeter, mettre" ; "dia" est peut-être dérivé de "dis" = "double", "douter", "à double sens".
Par ailleurs, Cernunnos est parfois représenté sous un double aspect : jeune imberbe / âgé, chauve, et il est lié par Jules César à " Dis Pater " —on retrouve ici le " dis "—. En tant que dieu de la terre et du monde souterrain, Dis Pater était lié à la mort et à la nuit, mais il était aussi géniteur, rayonnant et lumineux, au caractère guerrier, dieu druide, maître de la science, de la sagesse et de la magie. Encore un double !
Pour les gaulois, il était sans doute le "premier homme", ensuite divinisé et devenu maître de la vie et de la mort, à l'origine des êtres et des choses, père de la richesse souterraine et des techniques agricoles. Nous y reviendrons.
Nous avons affaire ici au chaos pré-sacrificiel, celui qui, à la suite des dérives de la contagion mimétique, dissout la communauté et conduit à l’indifférenciation (masques et inversion des rôles, beuveries, licence…).
Les bruits associés à ce chaos sont évoqués par les instruments cacophoniques, les cris, les chants.
Le chaos, à la fois déstructurant et contrôlé dans le temps s’achève sur la crémation du Bonhomme Carnaval, chargé de toutes les turpitudes du groupe, rappel du sacrifice de la victime propitiatoire ou ‘bouc émissaire’.
Puis, par un retournement cathartique de la situation, la victime devient idole, et on retrouve notre Cernunnos, symbole à la fois de la mort et de la nuit, et de la vie et de la lumière, initiateur de toutes choses et de l’ordre social en particulier.
Il s’agit bien là d’un " ludus ", c’est-à-dire d’un jeu, en ce que le jeu est lui aussi un ‘remix’ du sacrifice.
Ainsi, contrairement à ce que croient certains rationalistes désincarnés, ou intégristes, le Carnaval a une fonction essentiellement conservatrice de l’ordre, et cela à relativement peu de frais, par rapport à ce que coûtent les dérives incontrôlées d’une certaine jeunesse d’aujourd’hui.
Mais, allez faire comprendre cela à nos politiciens…

jeudi 9 octobre 2008

Lubies de grand-père

Lubies de grand-père

Le grand-père a envie de faire une halte sur le chemin.
Il a envie d’écouter le vent qui fait bruire, chanter ou gémir la forêt.
Il a envie de regarder voleter ce papillon sur la fleur du fossé : un survivant, déjà ?
Il a envie de sentir le parfum de la gitolle qu’il a coupée dans le taillis.
Et il a envie de faire partager tout cela à ses petits enfants.
On lui dira peut-être : « grand-père, tu es devenu poète ? », ou « Tu n’es plus de ce monde ! », ou encore : « Ça n’intéresse plus les jeunes, ça ! ».
A tout cela, il répondra que non !
Il répondra qu’il se croit encore assez lucide pour avoir une opinion.
En vérité, par-devers lui, il a la conviction que personne ne lui parlera ainsi et, d’ailleurs, pratiquement personne ne l’a jamais fait, car il sait bien que chacun a gardé au fond de lui une petite étincelle qui lui fait reconnaître qu’il a raison.
Car le grand-père regarde, et il écoute.
Il voit tous ces êtres humains qui s’affairent, qui luttent pour tenir leur standing, qui courent et se démènent, apparemment motivés par la noble vertu du labeur quotidien.
Parfois il les regarde dans les yeux, et il découvre dans leurs regards un désarroi étrange : tous ces gens, au fond d’eux-mêmes, savent qu’ils ne vont nulle part, ou pire, qu’ils vont à la catastrophe !
On a pu comparer le genre humain à un troupeau de buffles qui se rue à corps perdu vers un précipice : si l’un d’eux s’arrête, il se fait irrémédiablement piétiner. Et il continue…
Le grand-père n’est pas de ceux qui s’arrêtent ainsi; il se voit plutôt comme un coureur, engagé dans une course folle, et qui, petit à petit, se dégage du peloton pour mettre pied à terre, et se demander où elle va, cette course.
Il observe ces forcenés de l’inutile, et il perçoit encore chez eux, presque vivante, cette étincelle de la Sagesse antique, celle que parfois ils osent regarder, écouter, faite petite voix, lorsqu’elle leur dit qu’ils ont perdu le Sens.
Mais elle est dure à soutenir la vivante lueur qui parfois les transperce. Alors, vite ils la mettent sous le boisseau de la fuite en avant, sous la bonne conscience du labeur accompli, ou ils l’aveuglent par les clinquants de l’avoir et du paraître ; ils la noient dans le bruit qui envahit leur vide d’être.
Que leur dit-elle, cette petite voix ? Elle leur dit : « Est-ce que tu prends le temps d’aimer ? », « As-tu pensé que la vie est courte, que les matins sont beaux, que tu n’es pas dans l’essentiel ? ».
Formatés par les modes du temps dès la petite enfance, le grand-père les voit frénétiquement cultiver l’apprentissage de l’inutile, gaver leur corps et leur esprit des fruits de la futilité, ouvrir, béats, leur cœur à l’amour du néant…
Il écoute, ahuri, les cohortes de prédicateurs aveugles, ignorants, fanatiques, les conduire vers les précipices de la Vérité sondagière —serpent pervers qui se régénère par la queue—, des religions obscurantistes —‘Ne pense pas, mon petit, c’est caca !’— et de la vacuité consumériste —‘Roulez suréquipés, surdimensionnés, surbookés !’—, ou de l’imposture des « coaches » —‘Devenez des assistés : je m’occupe du reste !’—.
Il pense qu’il y a 2 400 ans Socrate, déjà, disait « Connais-toi toi-même, et tu connaîtras l’univers et les dieux. » Une maxime qui est, si c’est possible, encore plus subversive aujourd’hui qu’à l’époque où elle lui valut de boire la ciguë…
Il pense aussi à cet autre aphorisme qu’il se plaît à répéter : « Si tu ne sais pas où tu vas, au moins souviens-toi d’où tu viens ».
Et il compare l’avidité des foules de « ménagères de moins de cinquante ans », de « djeuns », de « cadres dynamiques », pour la culture poubelle qui inonde les media et les têtes, à ces vieilleries de la Sagesse antique.
Il se dit que, chaque jour qui passe, son choix est plus irrévocable.
Il se dit qu’il n’est candidat à rien et qu’il n’a pas besoin de dire à des foules de veaux ce qu’elles veulent entendre : qu’il aime le foot, le rap, le fric.
Il n’a envie de convaincre personne : tout au plus donner à voir, laisser une trace, déclarer que son monde culturel n’est pas de ceux qui aujourd’hui impèrent.
Il n’a aucun catéchisme à vendre ; le sien, vous le trouverez partout si vous voulez bien seulement vous baisser pour le prendre : il vous attend.
Interrogez les branches, les fleurs et akènes du chemin et vos mains qui les cueillent.
Prenez le temps d’y découvrir le Sens qu’elles vous offrent.
Et puis, écoutez les enfants car, eux, ils savent encore le faire.

LES ANIMATIONS